La téléconsultation a un cadre réglementaire assoupli depuis 2018. Elle doit répondre à certaines conditions réglementaires déontologiques.
Le décret du 13 septembre 2018 et l’arrêté du 1er août 2018 portant approbation par arrêté ministériel de l’avenant n°6 à la convention médicale ont profondément modifié les modalités d’organisation de toute activité de télémédecine et ont fait entrer la téléconsultation dans le droit commun de la prise en charge des actes médicaux par l’Assurance maladie. .
Le cadre légal et réglementaire
Les modalités de mise en œuvre des activités de télémédecine ont été redéfinies dans le décret du 13 septembre 2018 afin de libéraliser et de généraliser le développement de la télémédecine ; celle-ci n’est plus soumise à l’obligation d’une contractualisation avec l’ARS, à l’inscription dans un CPOM…etc. Le Conseil national de l’Ordre s’en félicite même s’il déplore que les offres de télémédecine en dehors du parcours de soins ne fassent plus l’objet d’aucune régulation d’aucune sorte. La téléconsultation est donc ouverte à tous les médecins quels que soient leur spécialité, leur mode d’exercice (libéral, salarié ou hospitalier), leur place dans le parcours de soins (médecin traitant et médecin de second recours) et leur secteur conventionnel. Le médecin doit être inscrit au Tableau de l’Ordre ou être en situation de remplacement dans les conditions réglementaires requises Par ailleurs, l’avenant n°6 à la convention médicale et la décision du 10 juillet 2018 de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie relative à la liste des actes et prestations pris en charge par l'assurance maladie ont précisé les modalités de facturation et de remboursement des téléconsultations réalisées dans le cadre du parcours de soins. Ainsi un nouvel acte intitulé « Consultation à distance réalisée entre un patient et un médecin dit “téléconsultant” » a été inscrit par l’UNCAM à la Nomenclature Générale des Actes Professionnels. Sa cotation est TCG pour les médecins généralistes et TC pour les autres médecins spécialistes. Les téléconsultations sont facturées suivant les tarifs en vigueur pour les consultations présentielles (majorations comprises). La téléconsultation sera prise en charge comme une consultation classique : 70 % remboursés par l’Assurance Maladie et 30 % remboursés par la complémentaire (prise en charge à 100 % pour les soins concernant des affections longue durée).
Des règles déontologiques spécifiques
La télémédecine est une forme de pratique médicale comme les autres. Sa spécificité est de faire appel aux technologies numériques : toutes les règles déontologiques de prise en charge d’un patient s’y appliquent. Le médecin téléconsultant est libre de décider de la pertinence ou non du recours à la téléconsultation : son indépendance professionnelle reste entière. Des règles déontologiques spécifiques à la télémédecine doivent être observées :
- le médecin devra s’assurer du consentement de son patient à la téléconsultation, après l’avoir informé de ses modalités techniques ;
- au regard de la confidentialité des échanges avec le patient, il devra veiller à la sécurisation des moyens utilisés pour la vidéotransmission ainsi que pour toute communication et transmission de documents pendant et à l’issue de la téléconsultation (résultats d’examens, données d’imagerie, ordonnances antérieures, prescription médicale, etc.) ;
- enfin, toute publicité à caractère commercial pour des offres de soins est interdite par le code de la santé publique, y compris bien sûr lorsqu’il s’agit de télémédecine ;
- à savoir : les vidéos des téléconsultations ne doivent pas être conservées.
L’Ordre des médecins recommande que tous les échanges (conversation, interrogatoire médical, échange de documents) fassent appel à un moyen unique de connexion sur une base sécurisée qui aura les caractéristiques d’un cabinet médical virtuel.
Les prescriptions à l’issue de la téléconsultation
Si une prescription est réalisée à l’issue de la téléconsultation, elle pourra soit être déposée électroniquement dans un espace sécurisé où le patient la récupérera, soit lui être adressée par courrier.
Le parcours de soins
Le principe retenu par l’avenant n°6 est celui de téléconsultations inscrites dans le parcours de soins coordonnés. L’avenant précise en effet clairement que la téléconsultation n’est prise en charge par l’Assurance maladie obligatoire que lorsqu’elle est effectuée dans le parcours de soins défini par la loi et la convention médicale. Le patient doit être connu du médecin téléconsultant (médecin traitant ou médecin de second recours) ce qui implique, dans les conditions fixées par l’avenant n°6, au moins une consultation physique au cours des 12 derniers mois précédant la téléconsultation. Les exceptions au parcours de soins s’appliquent aux téléconsultations : accès direct spécifique pour certaines spécialités, patient âgé de moins de 16 ans, urgence…). Ce principe est essentiel pour le conseil national de l’Ordre des médecins qui dénonce les risques d’ «uberisation» de la pratique médicale (offres onéreuses non remboursées provenant de plateformes établies en France ou dans d’autres pays européens, offres particulières réservées aux seuls bénéficiaires d’assurances complémentaires ou de mutuelles santé…).
Les organisations territoriales
L’avenant n°6 pose une exception à ce principe notamment lorsque les patients ne disposent pas de médecin traitant désigné. Dans ce cas, le recours aux téléconsultations est assuré dans le cadre d’organisations territoriales telles que équipes de soins primaires, maisons de santé pluri professionnelles, centres de santé, communautés professionnelles territoriales de santé, ainsi que toute organisation validée par les commissions paritaires locales pour leur capacité à proposer aux patients un suivi médical qui ne se réduise pas à des actes ponctuels de télémédecine. Ces organisations territoriales devront être référencées par les CPAM et portées à la connaissance des patients.
Les obligations de la plateforme de télémédecine
Lorsque vous décidez d’utiliser une plateforme de télémédecine à l’occasion de votre activité, vous devez vous assurer que le prestataire (qui met à votre disposition cette plateforme et qui est votre sous-traitant), respecte la réglementation. Le contrat de sous-traitance doit bien indiquer que le sous-traitant :
- ne traite les données à caractère personnel que sur votre instruction ;
- veille à la signature d’engagements de confidentialité par le personnel ;
- prend toutes les mesures de sécurité requises ;
- ne recrute pas de sous-traitant sans votre autorisation écrite préalable ;
- coopère avec vous pour le respect de vos obligations en tant que responsable de traitement, notamment lorsque des patients ont des demandes concernant leurs données ;
- supprime ou vous renvoie l’ensemble des données à caractère personnel à l’issue des prestations ;
- collabore dans le cadre d’audits.
S’agissant des données de santé, la plateforme doit être hébergée par un hébergeur de données de santé agréé ou certifié. → Je m’assure que le prestataire de télémédecine choisi est bien conforme avec la réglementation. → Je vérifie la présence des mentions obligatoires dans son contrat. → Je contrôle que le patient a bien été informé.
Comment éviter le mésusage :
Le Conseil national de l'Ordre des médecins a publié, fin décembre 2020, un rapport sur la téléconsultation et ses mésusages.
Cette pratique a connu l’an passé un essor fulgurant du fait de la pandémie de Covid-19. Une généralisation qui a fait émerger des questions, notamment d’ordre déontologique, et des mésusages.
Le mésusage de la téléconsultation : rapport du CNOM Après dix années d’observation de la télémédecine (depuis la première réglementation de la télémédecine en 2010), et deux années de généralisation progressive avec la libéralisation et la mise en place de son remboursement, la téléconsultation est aujourd’hui une pratique très répandue. Le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) s’est penché dans un rapport sur deux situations particulièrement exposées aux mésusages et aux pratiques non déontologiques. Ce document répond ainsi de façon concrète aux interrogations portant sur l’exercice exclusif en téléconsultation et sur l’usage d’une plateforme commerciale pour exercer une activité de téléconsultation. N’entrent pas dans le champ de cette étude : la téléexpertise et la télésurveillance médicale.
L’exercice exclusif en téléconsultation
Seule la téléconsultation, réalisée par un médecin libéral, salarié ou hospitalier, est examinée dans ce rapport. Une fois rappelées la réglementation en vigueur pour que la téléconsultation puisse être prise en charge par l’Assurance maladie dans un cadre convention- nel ainsi que les dérogations existantes, il apparaît que la pratique exclusive de la téléconsultation pose deux questions.
L’exercice exclusif de la téléconsultation est-il conforme à la déontologie médicale?
Si la téléconsultation peut être une aide à la prise en charge d’un patient, l’examen clinique reste le pilier et est indispensable. La téléconsultation ne constitue pas, à moyen terme, une mesure pour compenser le déficit de médecins, notamment dans les zones sous denses, même si elle peut dans certaines situations faciliter l’accès aux soins. En outre, si le médecin téléconsultant n’est pas dans le même territoire que le patient, la méconnaissance de la réalité du terrain par le médecin peut poser difficultés. Il ne peut donc être accepté qu’un médecin prenne en charge un patient :
- sans possibilité de procéder à un examen clinique chaque fois que cela est souhaitable;
- sans aucun ancrage territorial ni aucune connaissance du tissu sanitaire et médico-social;
- sans se préoccuper de son parcours de soins;
- sans apporter une garantie que la continuité des soins pourra être assurée.
La prise en charge de patients exclusivement en téléconsultation porte atteinte aux exigences déontologiques de qualité, de sécurité et de continuité des soins. Les conseils départementaux doivent recenser les médecins ayant une activité de téléconsultation exclusive et leur faire part de la nécessité de poursuivre une activité clinique.
L’usage d’une plateforme commerciale pour exercer une activité de téléconsultation
La réflexion porte ici uniquement sur les plateformes commerciales se présentant en « offreurs de soins » en dehors de toute organisation territoriale reconnue et de tout parcours de soins. La réalisation d’une activité de télémédecine n’est régulière que si elle se conforme aux principes déontologiques mentionnés aux articles L. 4127-1 et R. 4127-1 et suivants du code de la santé publique ainsi qu’aux principes fonda- mentaux garantis par le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale.
À quels aspects faire attention avant de s’inscrire sur une plateforme?
Beaucoup de plateformes commerciales proposent une organisation illégale, en particulier, dans la mesure où elles présentent leurs téléconsultations comme « remboursables », en dehors de tout ancrage territorial et en font une promotion de nature commerciale et d’ampleur nationale. Plusieurs aspects, listés ci-dessous, rendent ainsi la participation de médecins au fonctionnement de telles plateformes commerciales contraire au code de déontologie médicale :
- non-respect du parcours de soins;
- non-respect du cadre territorial prévu par la convention;
- absence de régulation au niveau de l’offre de soins;
- campagnes nationales d’information et exercice de la médecine comme un commerce ;
- circuit financier, paiement direct, obligation d’abonnement à la plateforme pour les patients ;
- hébergement des données de santé à caractère personnel en dehors d’un hébergeur de données de santé certifié ou agréé ;
- non-respect du secret médical.
Le Cnom entend rappeler fermement aux médecins que la réalisation de téléconsultations par le biais de plateformes commerciales de télé- médecine ne les exonère en aucun cas de leurs obligations déontologiques. Il leur appartient donc de demander aux sociétés commerciales par l’intermédiaire desquelles ils exercent de s’inscrire dans le cadre d’organisations territoriales référencées et de cesser toute campagne publicitaire nationale à visée commerciale. + D’INFOS : Consultez le rapport complet
Source: conseil-national.medecin.fr